Au rythme de L'Etoile

À peine arrivée à la gare de La Bastide-Puylaurent, je suis accueillie par Philippe. Vêtu de manière décontractée, il vient à ma rencontre avec la chaleur et l'aisance qui le caractérisent. Il a pris un moment loin de sa cuisine, où mijotent lentement ses préparations. Je monte à bord et m'élance dans l'aventure sur le paquebot "L'Étoile", d'un pas encore incertain. Déjà, des randonneurs qui parcourent les Cévennes de refuge en refuge, suivant le chemin de Stevenson, font leur entrée dans la véranda.

Je m'installe dans la chambre numéro sept, dotée d'un petit balcon, puis redescends par l'escalier en colimaçon. Ma connaissance de la maison était jusque-là limitée, car l'année précédente, je n'avais fréquenté que ma chambre, la grande salle à manger avec ses tables d'hôtes, un coin de la cuisine (où je débarrassais et lavais quelques verres à l'occasion) et l'espace dédié à la vaisselle (où je mettais souvent la table). Philippe se rend totalement disponible pour me faire découvrir sa grande demeure, ponctuant la visite de ses habituelles plaisanteries.

Le premier jour, je me contente d'observer, effectuant spontanément quelques gestes dans la cuisine qui surplombe la rivière de l'Allier, et reçois déjà des compliments. Le jour suivant, je me déplace avec une hésitation persistante dans cette vaste propriété dont je découvre l'agencement : la chambre froide m'impressionne, tout comme le pétrin et les grands bacs pour la vaisselle. Peu à peu, cette maison d'hôtes m'envoûte, et la grande salle, évoquant la galerie d'art déco de Salamanque en Espagne, brille de mille feux.

La cuisine devient un espace familier et enchanteur, presque magique lorsque Philippe s'attelle à la préparation de plats savoureux, diffusant des arômes qui se fondent dans les émotions et tissent une harmonie paisible et solide pour le reste de la soirée. Comment ne pas penser au célèbre ouvrage de Laura Esquivel, "Como agua para chocolate" ? Et puis, savourer un repas dans la cuisine confère aux aliments une saveur et une valeur inédites : le petit croûton de pain maison tout juste sorti du four, la cuillerée de fromage blanc, la délicieuse soupe maison, la viande accompagnée de pommes de terre nouvelles !

Un autre endroit que j'affectionne immédiatement est la petite terrasse côté jardin, avec sa table en fer et ses chaises vernies noires. J'aime y prendre mon petit-déjeuner, bercée par la brise matinale et entourée par le feuillage des arbres et de la vigne vierge. À L'Étoile, on redécouvre l'authenticité, la beauté et la bonté, l'essentiel en somme, grâce à Philippe qui, en plus de cuisiner, navigue entre les tables d'hôtes et les convives.

À la fin du repas, il les encourage même à participer au débarrassage, car l'espace vaisselle est accessible à tous. C'est tout un art et un concept qu'il s'efforce d'instaurer et de cultiver au quotidien. Il va jusqu'à improviser quelques mélodies au piano ou à chanter, accompagné de sa guitare, "Hotel California" ou "Winslow Arizona", avec un accent américain authentique, tandis que les derniers clients se détendent sur leur chaise en dégustant une infusion de verveine du Puy-en-Velay. Pour la première fois, le piano suscite ma curiosité. Je suis impatiente d'apprendre et Philippe m'offre mes premières leçons. Quelle aventure ! J'ai désormais trouvé mes repères sur ce paquebot fascinant, car cette bâtisse a une âme, et on s'y sent merveilleusement bien.